Termes de référence
Étude de
faisabilité technique — Option solaire
Transfert des eaux interbassins vers le lac Tchad
Présentée à la
Commission du bassin du lac Tchad
Ce document a été présenté à la Conférence internationale sur le bassin du lac Tchad
tenue à Abuja, au Nigeria les 26 et 28 février 2018.
Consultant : L’ingénieur Guy Immega
Solar Option Group
Vancouver, BC, Canada
guy.immega@kinetic.ca
Introduction :
En 2011, la firme CIMA International (Canada), liée par contrat à la Commission du bassin du lac Tchad, a réalisé une Étude de faisabilité du projet de transfert des eaux de l’Oubangui vers le lac Tchad. D’une façon générale, l’étude a recommandé la construction d’un barrage hydroélectrique d’une capacité de 360 MW sur l’Oubangui dans le bassin du fleuve Congo. La grande partie de l’énergie (250 MW) générée par ce barrage devait être utilisée pour transférer les eaux au lac Tchad.
Un barrage aménagé sur l’Oubangui causerait une inondation sur une surface de 200 km en amont, provoquant ainsi le déplacement des villages et la perturbation des activités de pêche et de navigation. La construction de ce barrage coûte également très cher, soit 2,7 milliards (selon la valeur du dollar en 2011). L’option solaire offre une alternative à ce barrage en matière de source d’énergie. Si l’on s’en tient à la proposition de spécifications du projet bâti sur l’option solaire, cette source d’énergie alternative permettra de transférer 1,58 milliard de m3/an au lac Tchad (50 % du débit du barrage hydroélectrique) à concurrence d’environ 267 millions USD (soit un montant inférieur à 10 % du coût du barrage hydroélectrique).
L’objet de l’étude proposée consiste à utiliser l’énergie solaire pour pomper de l’eau grâce à des ouvrages de captage immergés dans l’Oubangui. Cette approche permet de remédier aux impacts environnementaux du barrage hydroélectrique et repose sur l’énergie solaire constituant une source d’énergie renouvelable. Au départ, le pompage de l’eau sera effectué exclusivement pendant la journée, moment pendant lequel l’énergie solaire est disponible. Par la suite, le système de batterie de stockage pourra être employé pour le pompage de nuit. Par ailleurs, l’énergie solaire pourra être distribuée aux villes et villages environnants par la suite.
Bien que les présents Termes de référence s’inspirent des informations contenues dans l’étude de faisabilité antérieure de CIMA réalisée en 2011, et des propositions de Bonifica Transaqua entre 1970 et 2014, le concept actuel de TEIB (Transfert des eaux interbassins) à travers l’énergie solaire (l’option solaire) vise à atténuer l’impact sur l’environnement, à réduire les coûts et à employer l’énergie solaire qui est durable et renouvelable.
La portée des présents Termes de référence couvre l’ensemble des données techniques nécessaires pour la réalisation du TEIB vers le lac Tchad. Ils s’appliquent également aux spécifications technologiques et aux sources, aux infrastructures requises (telles que les routes), aux objectifs par étape et aux calendriers de construction échelonnée, ainsi qu’au budget.
Glossaire :
RCA – République centrafricaine
CIMA – CIMA International, une société de génie-conseil dont le siège se trouve à Laval, à Québec (étude antérieure)
RDC – République démocratique du Congo
TEIB — Transfert des eaux interbassins (du bassin du Congo au bassin du lac Tchad)
CBLT – Commission du bassin du lac Tchad
PV – Panneaux photovoltaïques hélioélectriques qui produisent de l’énergie à partir du rayonnement solaire
Option solaire – l’utilisation de l’énergie solaire (et non hydroélectrique) pour transférer l’eau au lac Tchad
1.
Énergie
solaire
1.1. Énergie photovoltaïque :
Ce projet sera
alimenté par des systèmes photovoltaïques (pas de barrage ni de risque d’inondation). La taille optimale
de la station d’alimentation photovoltaïque sera calculée. Un système
photovoltaïque particulier sera sélectionné, en fonction des critères liés au
coût, à la fiabilité, à la maintenance et de la durée de vie prévue de la
station. Dans un premier temps, la station d’alimentation photovoltaïque
produira de l’électricité en journée uniquement. Cependant, il est prévu
que cette station puisse contenir par la suite une installation de stockage d’énergie et d’autres sources d’alimentation afin de fournir de l’énergie 24 heures sur 24.
1.2. Site de la station d’alimentation
photovoltaïque :
Le choix de l’emplacement recommandé pour la station
d’alimentation
photovoltaïque sera déterminé en temps utile. Deux sites feront l’objet d’une étude et d’une comparaison : 1) le site
du fleuve Oubangui adjacent aux pompes; 2) le site reculé se trouvant dans la
région du sahel (qui offre plus de rayonnement solaire) qui nécessite une ligne
de transmission. Certains paramètres seront pris en compte, notamment l’insolation (l’intensité de l’exposition aux rayons solaires),
l’accès
par la route, les frais d’installation, l’itinéraire de la ligne de transmission,
le personnel d’exploitation requis et les exigences en matière de
maintenance.
1.3. Stockage par batterie de grande
capacité :
La technologie de
batterie de stockage d’énergie connaît une évolution rapide. Des
prévisions actuelles montrent que le prix des batteries lithium-ion de grande
capacité chutera à 100 USD/kWh d’ici à 2028. Les batteries de
stockage d’énergie de grande capacité peuvent assurer le pompage de l’eau 24 heures sur 24. De
nouvelles options en termes de batterie de stockage d’énergie à grande échelle seront
examinées à l’aune des critères liés au coût, à la fiabilité, à la durée
de vie et à la maintenance. L’étude recommandera la sélection et la
mise en service par étapes des batteries de stockage d’énergie.
1.4. Ligne de transmission :
Dans un premier
temps, la transmission d’électricité de la station d’alimentation photovoltaïque aux
pompes se fera uniquement pendant la journée. Toutefois, des dispositions
seront prises pour que les systèmes futurs de stockage d’énergie de grande capacité
assurent la transmission d’électricité pendant la nuit. Par la
suite, le réseau d’alimentation solaire pourra être connecté aux autres
réseaux, pour assurer une continuité de l’alimentation. L’itinéraire le plus adéquat pour
la ligne de transmission sera déterminé. La tension, la pose des pylônes en
fonction du niveau du sol et la technologie de conditionnement d’énergie seront déterminées. Les
aménagements nécessaires pour la distribution d’un excédent d’électricité aux villes et
villages voisins seront étudiés.
1.5. Construction échelonnée :
Un plan de
construction échelonnée de la station d’alimentation photovoltaïque sera
examiné. La mise en service rapide de l’installation photovoltaïque se
traduira par un pompage précoce. Dans la mesure où le dispositif de stockage d’énergie de grande capacité
devient opérationnel, permettant le pompage de nuit, la taille de la station d’alimentation photovoltaïque peut
s’en
voir modifiée. L’aménagement par étape du dispositif d’énergie solaire doit être en
phase avec l’aménagement par étape des ouvrages de captage d’eau, des pompes et des
canalisations.
2.
Pompage
de l’eau
de l’Oubangui
2.1. Utilisation de l’eau du fleuve Oubangui
Les estimations
mensuelles de débit saisonnier ainsi que le débit moyen et maximal seront
fournis, en conjonction avec la quantité d’eau disponible chaque mois en vue
du transfert diurne de l’eau au lac Tchad. Le but est de pomper l’excédent de débit à partir de l’Oubangui. Identifier les périodes
d’étiage
de l’Oubangui
lorsque le pompage n’est pas souhaitable. La quantité d’eau extraite de l’Oubangui aura un faible impact
sur l’aménagement
éventuel d’un barrage hydroélectrique à Palambo sur l’Oubangui ou des barrages
hydroélectriques prévus Grand Inga sur le fleuve Congo.
2.2. Impact de l’apport en eau sur le lac Tchad
Sur la base de l’estimation du volume d’eau transféré, la variation du
volume et du niveau d’eau sera calculée sur une période
déterminée (en prenant en compte l’évaporation, le détournement des
eaux à des fins d’irrigation et l’usage de l’eau au plan local). Trois
scénarios seront analysés relativement à l’ampleur du projet, au calendrier
de construction échelonnée, à la durée de pompage et au coût :
• Niveau 1 :
la quantité d’eau suffisante pour l’irrigation des produits agricoles
dans le bassin du lac Tchad;
• Niveau 2 :
la quantité d’eau nécessaire pour restaurer la pêche et les pâturages du
bassin du lac Tchad;
• Niveau 3 :
la quantité d’eau suffisante pour restaurer l’écosystème naturel du lac Tchad.
2.3. Emplacement du site de pompage
Les études
techniques antérieures ont proposé le site de Palambo sur l’Oubangui pour l’aménagement du barrage
hydroélectrique. L’avantage de ce site est que le fleuve Oubangui est étroit,
ce qui réduit le coût lié à la construction du barrage. Néanmoins, puisque l’option solaire permet d’éviter l’utilisation d’un barrage, d’autres sites seraient plus
indiqués pour les ouvrages de captage d’eau et les pompes. L’étude indiquera l’emplacement du site de
captage/pompage en prenant en compte la réduction au minimum de la longueur des
tuyaux nécessaires pour le transport de l’eau sous pression vers la crête
du bassin versant.
2.4. Ouvrages de captage immergés
Pour éviter l’inondation du fleuve Oubangui,
des ouvrages de captage immergés seront utilisés. L’étude indiquera les
caractéristiques et la conception desdits ouvrages. Les prises d’eau seront immergées dans l’Oubangui ou dans un ouvrage de
déviation aménagé. Elles seront conçues de manière à réduire l’envasement, l’affouillement, l’exposition pendant les périodes d’étiage et l’impact des inondations. Les
infrastructures aménagées au niveau de la rive, le raccordement aux pompes, les
exigences en matière de maintenance et les procédures seront déterminées. Les
barrières physiologiques et/ou les autres systèmes (par exemple les grilles
électriques à poissons) à installer sur les ouvrages de prise d’eau seront également examinés.
Les ouvrages de captage d’eau immergés ne devront pas influer
négativement sur la navigation de l’Oubangui.
2.5. Exigences liées au pompage
Le type, la taille,
l’efficacité
et la puissance des pompes seront déterminés sur la base du volume d’eau de l’Oubangui disponible aux fins de
pompage. Les pompes peuvent être intégrées à des ouvrages de captage d’eau immergés ou installées
ailleurs. Des stations multiples et parallèles de pompage permettront de
transférer des quantités variables d’eau, en fonction de la quantité d’énergie solaire disponible selon
les saisons.
2.6. Canalisation et canaux
L’étude de faisabilité antérieure
de CIMA a indiqué un itinéraire pour la canalisation et les canaux à travers la
RCA, jusqu’au Chari au Tchad. L’étude réalisée par CIMA a proposé
trois conduits parallèles de 6 mètres de diamètre pour assurer le pompage
de l’eau
sur le site de Palambo sur l’Oubangui; cette spécification fera l’objet d’un examen pour évaluer son
applicabilité. L’ajout de canalisations et/ou de canalisations d’un diamètre inférieur sera
probablement plus en adéquation avec l’aménagement par étape des
ouvrages de captage immergés et des pompes.
L’itinéraire proposé par CIMA pour
la canalisation acheminant l’eau pompée empruntait le lit du fleuve
Tomi jusqu’à la crête du bassin versant, niveau auquel une tranchée
permettrait de desservir le bassin du lac. Les canaux et les ouvrages sur le Tomi,
le Fala, l’Ouham et le Chari permettraient de diriger l’eau par gravité vers le lac
Tchad. La nouvelle étude de faisabilité bâtie sur l’option solaire passera en revue
les itinéraires proposés par CIMA pour la canalisation et les canaux, dans le
but de réduire au minimum la distance et les coûts. Les entraves éventuelles
seront identifiées, y compris les barrières physiques, géographiques et les
contraintes liées aux infrastructures (par exemple, les routes, les voies
ferrées, etc.). L’étude déterminera les mesures prises pour surmonter les
reliefs accidentés.
2.7. Fleuve Kotto
L’étude de faisabilité de CIMA a
également proposé une source d’eau secondaire pour le lac Tchad en
provenance du barrage de Bria sur le fleuve Kitto (à l’est de la RCA à proximité du
Soudan du Sud). Étant donné que l’option solaire a écarté la nécessité de
construire des barrages, le barrage de Bria ne sera pas pris en compte.
Cependant, l’étude de faisabilité examinera la possibilité pour le Kotto
de constituer une source d’eau saisonnière pour le lac Tchad. L’écoulement par gravité à partir
du Kotto peut s’avérer pratique ou pas.
2.8. Maintenance, durée de vie et
sécurité
Étant donné que les
pompes alimentées par énergie solaire, les canalisations et les canaux utilisés
pour alimenter le lac Tchad en eau seront installés dans des régions reculées
de la RCA, la fréquence de leur maintenance constitue un problème majeur. L’estimation du nombre et du type
de techniciens qualifiés requis pour assurer la continuité du TEIB sera
déterminée. Les compromis éventuels entre la modernisation des technologies, le
coût du projet, les frais de maintenance et la durée du projet seront examinés.
Enfin, puisque les itinéraires choisis pour la canalisation, les canaux et la
ligne de transmission traversent des régions en proie à l’instabilité politique et aux
troubles sociaux, la surveillance des risques liés au sabotage, au vol d’eau et à la sécurité sera prise
en compte.
2.9. Étude d’impact environnemental
• Contamination
croisée des espèces
Le transfert des eaux de l’Oubangui fait peser le risque de
migration des espèces du fleuve Congo dans le lac Tchad. D’autres systèmes de transfert d’eau ont résolu ce problème,
notamment les barrières physiologiques (que l’on utilise sur les centrales
hydroélectriques) ou la grille électrique à poissons utilisée dans le canal
sanitaire et naval de Chicago. La nouvelle étude évaluera les risques et
recommandera les contre-mesures appropriées.
• Migration
et infrastructures de passage aménagées pour les animaux
La construction des canalisations, des
canaux et des lignes de transmission sur des centaines de kilomètres perturbera
le déplacement des animaux locaux. Les infrastructures de passage aménagées
pour les animaux (ponts, tunnels) et les autres technologies d’atténuation des effets du projet
seront prises en considération.
• Impact
des travaux de construction
La construction des canalisations, des
canaux et des routes pourrait entrainer des perturbations écologiques,
notamment au niveau des berges. Ces perturbations devront être identifiées en
conjonction avec les mesures d’atténuation recommandées. Les
canalisations seront enfouies sous terre lorsqu’elles traverseront la route.
• Avantages
sur le plan écologique
L’utilisation de l’électricité solaire aux fins de
cuisson peut réduire la consommation du bois de chauffage et promouvoir le
reboisement (Grande Muraille verte).
2.10.
Avantages
sociaux et économiques
L’étude technique présentera un
aperçu des avantages sociaux et économiques directs et indirects du projet. La
prévision des retombées économiques sera répartie en trois catégories :
les contributions financières, l’emploi pendant les phases de construction
et la modernisation des infrastructures sur le long terme (y compris les
routes, l’approvisionnement en eau pour les villages et l’électrification en milieu rural).
[NB : Les avantages sociaux et économiques supplémentaires sur le long
terme — notamment
l’agriculture
et la sécurité alimentaire, l’accroissement des opportunités d’emploi et la création de
richesses — découleront du renforcement de la viabilité de l’industrie agricole au profit des
populations du bassin du lac Tchad.]
2.11.
Problèmes
nationaux et transfrontaliers
La coopération
internationale est indispensable dans le projet de TEIB de l’Oubangui au lac Tchad. Puisque le
fleuve Oubangui forme la frontière entre la RDC et la RCA, le captage de l’eau peut affecter les deux pays.
Toutefois, aucune infrastructure n’est requise sur le territoire de
la RDC. L’eau provenant de l’Oubangui traversera la RCA et
plongera dans le bassin du lac Tchad à travers l’un ou plusieurs des affluents du
Chari; l’emplacement ou les emplacements de ce point de
franchissement seront déterminés et tout problème d’ordre technique ou
environnemental sera identifié. Après avoir traversé la RCA pour desservir le
Tchad, l’eau va amplifier l’écoulement en altitude du Chari
et l’environnement
pourrait en être affecté : tous les ouvrages nécessaires à réaliser sur
les affluents du Chari et sur le Chari lui-même, notamment la stabilisation des
berges et le dragage, seront déterminés.
3.
Budget
et calendrier de construction au titre de l’option solaire appliquée au TEIB
La nouvelle étude de
faisabilité technique du TEIB présentera un budget complet et un calendrier de
construction relativement au projet. Les éléments suivants doivent être pris en
compte (entre autres) :
• Le
coût de deux technologies différentes pour l’option solaire : les
panneaux solaires, les batteries de stockage d’énergie, le dispositif de commutation,
etc.
• Le
coût des ouvrages de captage, des pompes et des canalisations, y compris leur
installation et entretien.
• Le
coût des canaux et de l’aménagement des voies navigables, y
compris sur le Chari.
• Le
coût des tâches liées à l’administration, la gestion et la
comptabilité inhérentes au TEIB, en prenant en compte le rôle de la CBLT.
• Le
coût des infrastructures requises, y compris les routes, l’énergie, l’hébergement des travailleurs,
etc.
• Le
coût de la main-d’œuvre pour les travaux de construction de chaque ouvrage du
système de TEIB.
• Le
coût de la maintenance continue de chaque composant du système de TEIB.
• Le
coût des mesures de sécurité applicables pendant la phase de construction et
au-delà.
• Un
calendrier détaillé de construction échelonnée, y compris les échéances.
• Un
calendrier illustrant la répartition des coûts par étape, permettant de décrire
les apports progressifs en appui financier.